mercredi 16 septembre 2009

La Poste impose des « sous-facteurs » contre l'avis syndical

Précédent dangereux pour les entreprises publiques

La Poste impose des « sous-facteurs » contre l'avis syndical

La Poste et le front commun syndical s’opposent sur le statut des nouveaux “facteurs de quartier”. La Poste passe outre l'avis syndical. Les syndicats se réunissent pour élaborer la riposte.

Il y a déjà plus d’un an, la Poste annonçait son intention d'introduire un système de « livreurs » à temps partiel, à l’instar de la Hollande. Ils se voient juste aujourd’hui affublés d’un autre nom: facteurs de quartier. La version finale que la direction a défendue devant la Commission Paritaire de jeudi 10 septembre prévoit pour ces derniers un salaire horaire brut de 8,41 €. Ces facteurs seraient engagés sur une base de 3h 47 par jour. Après six mois ininterrompus de travail, de petites primes s'y ajouteraient: 1,41 € de chèque-repas, 0,369 € par jour d'indemnité RGPT (prime pour travail extérieur sans infrastructure, notamment sans WC qu'il faut donc pouvoir payer durant la tournée), 0,05 € par km pour l'utilisation du vélo personnel.

La crainte des syndicats est très clairement la disparition du statut des facteurs actuels, par un procédé d’extinction progressive au profit de « sous-facteurs », moins chers et moins protégés, qui viendraient remplacer les départs à la pension.
En outre, les “facteurs de quartier” seront-ils des salariés ou des indépendants ? Car la loi postale n'est toujours pas votée. Si le Ministre Van Quickenborne arrive à imposer son point de vue, les concurrents pourront travailler avec des indépendants. Dans ce cas, la Poste fera de même!

Pas de fatalité

Après le non syndical, La direction de la Poste a fait savoir qu'elle « prendra les dispositions nécessaires pour poursuivre la réorganisation. » L'article 35 de la loi de 1991 prévoit que lorsqu'une proposition est refusée en Commission paritaire, la Direction a le droit de passer le relais au Conseil d'Administration qui peut alors décider seul.

Cet article de la loi sur les Entreprises Publiques n’a jamais été appliqué et il s’agirait d’un précédent dangereux: les syndicats sont mis sur le côté. Si cela passe à La Poste, demain il peut être d'application aussi à la SNCB ou à Belgacom. Les réactions syndicales fusent. Michel Meyer (CGSP Poste) : « Désireuse de réaliser des bénéfices en pratiquant le dumping social, La Poste n'apporte aux agents aucune certitude quant à la stabilité de l'emploi.»
Réaction immédiate aussi à Liège et à Seraing où les facteurs et trieurs de nuit sont partis en grève dès ce fameux jeudi-soir.

Pour ceux qui verraient là une fatalité, rappelons que les actionnaires de la Poste ont touché en 2009 un dividende de 172 millions d'€ contre 60,8 millions en 2008 (1). 86 millions d’euros pour l'Etat, et 86 pour l'actionnaire privé. Ce dernier, CVC Capital Partners, obtient ainsi une marge bénéficiaire de 28 %. Voilà le résultat de toutes les restructurations à la Poste.
Pour le premier semestre de 2009 également, « l'entreprise a pu réduire encore ses frais de fonctionnement et ainsi limiter les dégâts (des effets de la crise). Grâce à ces économies, le résultat d’exploitation normalisé du premier semestre 2009 (139 millions d'€) a pu être maintenu au niveau du premier semestre 2008 (135 millions d'€).»(2)  Les actionnaires sont ainsi rassurés pour leurs prochains dividendes !
Tout ça sur le dos des postiers et des usagers.

Le PTB a donc fait le calcul suivant: Si la somme de 172 millions d'€, au lieu d'être distribuée aux actionnaires, était ré-investie dans la Poste, sous forme d'emplois, cela représenterait environ 4 000 emplois… solution plus sociale que de recourir à des “facteurs de quartier” !

Edith Janssens
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(1) Le Soir, avril 2009
(2) Communiqué de la Poste, 31.08.09

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